Personnage de théâtre, d'opéra et de ballet

Suzanne

Dénomination : Suzanne
Genre : Femme
Occupation : Camériste, dame de compagnie ou domestique
Nationalité : Espagnole
Dates : XIXe siècle (XVIIIe siècle dans la pièce de théâtre originelle)
Lieu : Espagne
Sources : Les Noces de Figaro (1786), de Wolfgang Amadeus Mozart (opéra bouffe italien). Opéra inspiré de la pièce de théâtre française La Folle Journée, ou Le Mariage de Figaro  (1778) de Beaumarchais.

Identité du personnage qui harcèle : Comte Almaviva : noble, époux de la maîtresse de Suzanne
Résumé : Dans Les Noces de Figaro, on suit le comte Almaviva, son épouse et leurs domestiques respectifs, Figaro et Suzanne, qui préparent leurs noces. Dans cet opéra, suite du Barbier de Séville, c’est Almaviva qui devient harceleur : infidèle à sa femme, il « veut aussi tenter sa chance au château » et charge son maître de musique de « répéter chaque jour cette chanson » à Suzanne (I.1), précisant qu’il entend rétablir pour elle le droit de cuissage qu’il avait précédemment aboli. Le harcèlement sexuel est ici avéré, tant en raison de la répétition quotidienne que du caractère dégradant du chantage auquel est livrée Suzanne, sommée de céder au comte en raison de droits féodaux depuis longtemps tombés en désuétude. Dans l’acte III, Almaviva renverse la faute, accusant Suzanne de le faire languir à dessein, ce à quoi elle répond (III.1) : « Monsieur, une femme a toujours tout son temps pour dire oui ». Si c’est elle qui rappelle au comte les règles de la bienséance, Suzanne n’en est pas moins soumise à une double domination : femme dans une société patriarcale, elle est également simple domestique dans un monde régi par la société d’ordres. L’idée que Figaro puisse jouir d’une femme qui se refuse à lui exacerbe la fureur du comte, qui fulmine : « Verrai-je, alors que je soupire, l’un de mes serviteurs comblé ? Et faudra-t-il qu’il possède un bien que je désire en vain ? Verrai-je unie à un vil coquin par la main de l’amour celle qui en moi a éveillé une affection qu’elle ne ressent pas pour moi ? » (III.4). La résistance que lui oppose Suzanne, réduite à un simple « bien », n’est rien comparée à l’idée que l’un de ses serviteurs puisse jouir de celle qu’il ne parvient à séduire ni par ses promesses, ni par sa fortune. Cependant, la menace de rétablir les droits féodaux n’est jamais mise à exécution.
Pour aller plus loin : “#MeToo à l’opéra : auteurs et victimes de harcèlement sexuel dans les grands oeuvres du répertoire”, Caroline Giron-Panel

Rosina

Dénomination : Rosina, Ou Rosine
Genre : Femme
Occupation : Sans profession, noble
Nationalité : Espagnole
Dates : XIXe siècle (XVIIIe siècle dans la pièce de théâtre originelle)
Lieu : Espagne
Sources : Le Barbier de Séville (1816), de Gioachino Rossini (opéra-bouffe italien). Opéra inspiré de la pièce de théâtre française Le Barbier de Séville ou La Précaution inutile (1775) de Beaumarchais.

Identité du personnage qui harcèle : Bartolo : docteur ; tuteur de Rosina
Résumé : Dans Le Barbier de Séville, le harceleur se trouve dans une position de domination en raison de son âge et de son lien de parenté avec sa victime. Il s’agit, de fait, de conditions structurelles de harcèlement, Amoureux de sa pupille, Rosina, qui aime le comte Almaviva, Bartolo craint que Rosina ne cède à un autre que lui et n’hésite pas à l’enfermer (« Par cette porte, même l’air n’entrera plus. Et Rosine, la petite innocente, désolée, désespérée, restera enfermée dans sa chambre aussi longtemps que je le voudrai » [I.14]). Il exerce sur elle une pression constante, exigeant qu’elle lui rende compte de ses moindres faits et gestes (I.14). Si Bartolo affirme agir par amour pour Rosina (« Plus je l’aime et plus elle me dédaigne » [I.11]), les autres personnages voient en lui un despote (« Je ne peux jamais apparaître sur le balcon sans la présence continue de mon tyran. Soyez cependant sûr que la malheureuse Rosine est prête à tout pour rompre ses chaînes » [I.15]), un vieillard ridicule et libidineux motivé par l’appât du gain (« C’est un vieil avare endiablé, soupçonneux, grincheux ; il a au moins cent ans et veut encore faire le galant : vous devinez ? Il s’est mis en tête d’épouser Rosina pour lui manger tout son héritage. Au secours ! » [I.5]). Le livret de Rossini met en scène toutes les étapes du harcèlement, à commencer par la mise en place d’un environnement oppressant, visant à contraindre la jeune fille à céder aux avances du vieillard, qui use de sa position dominante, en raison de son âge et de son statut de tuteur, pour exercer sur Rosina une pression de plus en plus forte, allant jusqu’à affirmer : « De gré ou de force, je veux épouser ma Rosina avant demain » (I.12) -, l’usage du pronom possessif étant évidemment ici lourd de sens. 
Pour aller plus loin :  “#MeToo à l’opéra : auteurs et victimes de harcèlement sexuel dans les grands oeuvres du répertoire”, Caroline Giron-Panel

Leonora

Dénomination : Leonora 

Genre : Femme
Occupation : Dame d’honneur
Nationalité : Espagnole
Dates : XIXe siècle
Lieu : Espagne
Sources : Le Trouvère (1851), de Giuseppe Verdi (opéra italien). Opéra inspiré du drame espagnol El Trovador (1836) d’Antonio Garcia Gutiérrez.
Identité du personnage qui harcèle : Comte de Luna : noble
Résumé : L’opéra met en scène un triangle amoureux entre un couple modeste (Leonora, dame d’honneur de la princesse d’Aragon, et Manrico, présenté comme le fils d’une bohémienne) et un harceleur qui les domine en raison de sa position sociale, le comte De Luna. De Luna est présenté comme un homme sans scrupules, prêt à abuser de son pouvoir pour obtenir celle qu’il convoite. Tout en étant pleinement conscient de mal agir, il rejette la faute sur Leonora qui se refuse à lui (« J’abuse peut-être du pouvoir absolu que m’a transmis le prince. Tu me pousses à cela, femme pour moi funeste ! » [IV.1]). Son harcèlement est à la fois physique et psychologique : à l’acte I, il profite de la nuit pour se rendre sans y être invité dans la chambre de Leonora (acte I, scène 2 : « Il faut que je te voie, que tu m’entendes. Me voilà »), affirmant à l’acte II être prêt à tout pour la faire céder (« En vain un Dieu rival s’oppose à mon amour, même un Dieu ne saurait, femme, t’arracher à moi » [II.2]). À l’acte IV, le harcèlement se fait davantage psychologique : alors que Leonora tente par tous les moyens d’obtenir la grâce de Manrico, le comte De Luna prend un plaisir malsain à lui rappeler qu’elle est la cause de tous ses maux (« Plus tu l’aimes et plus terrible s’embrase ma fureur » [IV.1]), avant de lui céder lorsqu’elle lui propose de s’offrir à lui en contrepartie de la vie de son amant. 
Pour aller plus loin
“#MeToo à l’opéra : auteurs et victimes de harcèlement sexuel dans les grands oeuvres du répertoire”, Caroline Giron-Panel

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